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Dans nos archives il y a… un artiste qui s’ignore

Dans nos archives il y a… un artiste qui s’ignore

“En témoignage de reconnaissance envers tous ceux et toutes celles à qui j’ai dû ces années heureuses et qui favorisèrent avec sollicitude ou sans le savoir mon premier apprentissage de la vie”. Préambule à Eveils, Œuvres de Jean Schlumberger, tome VI (1940-1944).

Nous avions mis en lumière lors d’un précédent article les talents d’artiste de Suzanne Weyher, épouse de Jean Schlumberger qui fut l’élève de Théo Van Rysselberghe, mais nous connaissons moins les dessins d’adolescent et de jeune adulte de Jean Schlumberger, ébauches conservées dans les archives du Cabinet du même nom.

Et pourtant, à 15 ans déjà, notre écrivain croque avec un talent certain les paysages de son adolescence.

Un premier carnet, sans titre, et recouvert de tissu gris-crème, ouvre le bal avec 25 croquis qui représentent principalement des paysages alsaciens et normands, et dont la plupart sont datés de 1892.

Pourquoi l’Alsace ? Jean Schlumberger y est né le 15 mai 1877 à Guebwiller, commune située à une vingtaine de kilomètres de Mulhouse. C’est à l’âge de 15 ans qu’il quittera sa région natale pour s’inscrire en classe de rhétorique à Paris au lycée Condorcet.

La présence dans le même carnet de paysages normands s’explique également par l’histoire familiale. La propriété du Val–Richer dans le Calvados a été acquise en 1836 par François Guizot, son illustre ancêtre. Le célèbre historien et homme d’état français souhaitait un lieu pour y mettre ses enfants au vert. Il est donc normal de trouver dans ce carnet des esquisses de paysages glanés sur la route de Trouville ou sur la côte normande…

Le second carnet intitulé “Voyage en Italie avec mes parents – 1897” comporte le récit de ce petit tour de la péninsule via Pise, Naples, Rome ou Venise, qu’effectue Jean Schlumberger de la mi-janvier à la mi-février 1897. Les 80 pages manuscrites de ses notes comportent aussi une dizaine de croquis, dont un beau dessin de Paestum, important site archéologique antique.

L’affection de Jean Schlumberger pour l’Italie est ancienne. Dans Eveils il raconte : J’ai retrouvé un petit album où la gaucherie des dessins trahit une main de sept ou huit ans. : tracé aux crayons de couleur, un drapeau rouge-blanc-vert y est surmonté d’un naïf Viva l’Italia. Simple besoin de me singulariser parmi les autres gosses ? Je me plaisais à les étonner en économisant quelques pfennigs pour un voyage qu’un jour je ferai là-bas. Son attente sera comblée par ce premier voyage qu’il fera avec ses parents, voyage agrémenté par de nombreuses visites des principaux monuments antiques. Jean Schlumberger retournera à Rome sept ans plus tard en 1904 avec sa jeune épouse, pour un long séjour qui comptera énormément dans leur formation à l’un et à l’autre. Un troisième voyage en 1938, dans une ville métamorphosée par les grands travaux d’urbanisme entrepris par Mussolini, donnera lieu à une petite publication, Pierres de Rome, mais cela est une autre histoire…


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
ldiebold (16 mai 2025). Dans nos archives il y a… un artiste qui s’ignore. Les carnets de la Fondation des Treilles. Consulté le 17 juin 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/13xuf